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9 octobre 1999
Statues d'Helena et Nicholas Roerich
à l'entrée au Musée de N. Roerich, Moscou (Russie).
Érigé pendant les célébrations de jubilé du 125ème anniversaire de N. Roerich
et du 120ème anniversaire d'Helena Roerich.
Les conspirationistes sont des Serviteurs Inutiles parmi tant d'autres ...
Nicolas K. Roerich " Madonna Oriflamma ", 1932
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Washington, la Maison Blanche, le 15 avril 1935
La signature du Pacte Roerich par les dirigeants des vingt pays d'Amérique latine et les États-Unis.
Le fondamentalisme du jour :
"Selon la prophétie des plus anciens Instructeurs, l'Époque de Maitreya viendra lorsque l'humanité aura perdu les fondements de l'Enseignement et sombrera dans l'obscurité.
Les piliers que Nous envoyons pour soutenir les fondements de l'Enseignement sont destinés à régénérer la compréhension spirituelle. Ainsi, dites-le à ceux qui ne comprennent pas, attirez l'attention sur la doctrine du cur ! "
HIÉRARCHIE (1931) - Nicolas Roerich (Serge Macronowsky), page 3 Edition Numérique
Le peintre juif russe Nicolas ROERICH (1874-1949) avait, en son temps, adhéré avec sa femme à la Théosophie et à l'École Arcane d'Alice Bailey.
Le vrai nom de Roerich était Serge Macronowsky.
Il était ami du maçon Tagore et « gourou » du vice-président des U.S.A., le maçon Henry A. Wallace (1888-1965), durant l'adminitration Roosevelt. Wallace, personnalité fascinée par l'occultisme, n'eut pas de mal à convaincre le juif Henry Morgenthau (banquier membre du B'nai B'rith, de la Pilgrims' Society et de la Round Table britannique), qui était alors secrétaire au Trésor américain, de faire imprimer en 1935, selon les désirs de Roerich, le symbolisme ésotérique de la grande Pyramide du Bristish Israel et la devise « Novus Ordo Seclorum » sur le nouveau billet de un dollar américain. Roerich est aujourd'hui l'une des figures émergentes qui inspirent le mouvement New Age.
Pour lire la prose du "mage de la Mort" du rite tantrique de Bonnet Noir des hauts plateaux.
Va falloir cliquer les gars sur les liens ci-dessous ; Pas de molesse ...
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Toute sa prose, ainsi que celle de son épouse en prime.
Roerich Elena et Nicolas
Roerich Elena & Nicolas
Agni Yoga - résumé des 14 ouvrages
1924 - Les Feuilles du Jardin de Morya - I - L'Appel
1925 - Les Feuilles du Jardin de Morya - II - Illumination
1926 - Ère nouvelle - Communauté
1929 - Agni Yoga
1930 - L'Infini - I
1930 - L'Infini - Infinité - II
1931 - Hiérarchie
1932 - Cur
1933 - Monde de Feu - I
1934 - Monde de Feu - II
1935 - Monde de Feu - III
1936 - AUM
1937 - Fraternité
1938 - Surterrestre - La vie intérieure de la Fraternité
Shamballa, la resplendissante
Hiéroglyphes & Hiéroglyphes - Poèmes
Les fondations du Bouddhisme
Nicolas Konstantinovitch Roerich naquit à Saint-Pétersbourg, Russie, le 9 octobre 1874. Il était laîné des deux fils de lavocat Konstantin Roerich et de sa femme Maria. Il grandit dans le confort dune famille de la haute bourgeoisie russe et eut lavantage de connaître des écrivains, artistes et scientifiques qui fréquentaient ses parents. Jeune, il manifestait déjà une soif de connaissance et du talent dans des domaines très variés. À lâge de neuf ans, il accompagna un archéologue de renom qui lavait invité à explorer les fouilles de tertres funéraires quil dirigeait dans la région. Laventure de déterrer de ses propres mains les objets mystérieux des époques lointaines éveilla en lui un intérêt pour larchéologie quil conserva toute sa vie. Grâce à laide dautres amis, il se mit à collectionner objets préhistoriques, pièces de monnaie et minéraux, et il créa sa propre plantation, pour y étudier plantes et arbres. Adolescent, Roerich se montra particulièrement doué pour le dessin, et il eut, à lâge de seize ans, le désir dentrer à lAcadémie des beaux-arts et de devenir artiste. Son père cependant, qui considérait une carrière artistique indigne dun membre responsable de la société, insista pour que son fils suive son exemple, quil étudie donc le droit. On arriva à un compromis: à lautomne 1893, Nicolas sinscrivit et à lAcadémie des beaux-arts et à lUniversité de Saint-Pétersbourg.
En 1895, Roerich fit la connaissance de léminent écrivain et historien, Vladimir Stassov, et, grâce à celui-ci, de bien des compositeurs et artistes de lépoque: Moussorgski, Rimski-Korsakov, Stravinski et la basse Féodor Chaliapine. Aux concerts du Conservatoire Impérial, il entendit pour la première fois les uvres de Glazounov, Liadov, Arenski, Wagner, Scriabine et Prokofiev: un profond amour et un enthousiasme pour la musique se développèrent en lui. Cest surtout la musique de Wagner qui lui plut et plus tard, pendant quil travaillait comme décorateur de scène, il créa des décors et des costumes pour la plupart des opéras wagnériens. De plus, on peut appliquer avec justesse aux tableaux de Roerich les termes et analogies propres à la musique. Souvent il établissait des correspondances qui reliaient la musique et lemploi de la couleur et des harmonies chromatiques et il appliquait ce sens des correspondances à ses dessins pour lopéra. Comme lécrit Nina Selivanova dans son livre Le Monde de Roerich: «La force originale de luvre de Roerich consiste en une symétrie magistrale très marquée et en un rythme clair et défini, qualités que lon retrouve dans la mélodie dun chant épique.»
À la fin des années 1890, on assista à une floraison des arts en Russie, et particulièrement à Saint-Pétersbourg, où lavant-garde formaient des groupes et des alliances, animés par le jeune Sergueï Diaghilev. Il précédait Roerich dune ou deux classes à la Faculté de droit et fut parmi les premiers à apprécier ses talents de peintre et darchéologue, étudiant le passé de leur pays.
Parmi les tout premiers accomplissements de Diaghilev fut la création de la revue Le Monde de lart, avec lappui de la princesse Tenicheva et dautres mécènes. Bien que relativement peu de numéros de cette revue aient paru, elle exerça une influence capitale sur les divers groupements dartistes russes. La revue se déclarait hostile aux académiciens, aux sentimentalistes et aux réalistes. Elle présentait à ses lecteurs--membres de lintelligentsia pour la plupart--les aspects essentiels des cercles artistiques russes, le post-impressionnisme européen, et le mouvement moderniste. Roerich y a contribué et a siégé au conseil de rédaction. Parmi les autres artistes qui sy sont impliqués, citons Alexandre Benois et Léon Bakst, qui devaient par la suite collaborer avec Roerich aux débuts des Ballets Russes de Diaghilev.
Après avoir achevé sa thèse universitaire, Roerich projetait de partir un an pour visiter les musées, expositions, studios et salons de Paris et de Berlin. Peu avant son départ, il rencontra Éléna, fille de larchitecte Chapochnikov et nièce du compositeur Moussorgski. Il semble que tous deux aient éprouvé le même plaisir à cette rencontre et bientôt, ils se fiancèrent. Après le voyage de Nicolas en Europe, leur mariage fut célébré.
Éléna Roerich était une femme remarquablement douée, pianiste de talent et auteur de plusieurs livres, dont Les Fondations du Bouddhisme et une traduction russe de La Doctrine secrète dHéléna P. Blavatsky. Ses Lettres, publiées en deux volumes, illustrent la sagesse, la pénétration spirituelle et la simplicité des conseils quelle offrait à une multitude de correspondants--amis, ennemis et co-travailleurs.
Ensemble, Nicolas et Éléna Roerich fondèrent la Société Agni Yoga, mouvement pour une éthique vivante qui comprend et synthétise les philosophies et enseignements religieux de toutes les époques.
Afin de subvenir aux besoins de son ménage, Roerich posa sa candidature au poste de secrétaire à la Société pour lencouragement des arts à Saint-Pétersbourg. Il lobtint. Plus tard, on le nomma directeur de la Société, la première des nombreuses positions qui allaient permettre à Roerich à la fois denseigner les arts et den devenir le porte-parole.
Roerich résolut de tout réexaminer, afin de sortir la Société de létat de médiocrité académique où elle sombrait depuis de longues années. Il institua un système de formation artistique qui semble révolutionnaire encore aujourdhui: tous les arts--peinture, musique, chant, danse, art dramatique et ce que lon appelait «arts industriels» comme la céramique, la peinture sur porcelaine, la poterie et le dessin mécanique--étaient enseignés sous le même toit, et chaque professeur créait en toute liberté son propre programme.
Le croisement des arts que prônait Roerich témoigne de son désir, dans tous les domaines de la vie, dharmoniser, rapprocher, trouver des correspondances entre les éléments apparemment hostiles ou opposés. Il sagit là dune qualité essentielle de sa pensée et on la retrouve dans toutes les disciplines quil explora. Constamment il chercha à détruire le compartimentage et, jusque dans sa propre production artistique, il échappa à la catégorisation et créa un univers unique, personnel. De même, dans ses écrits sur léthique, on voit quil ne cessa jamais de chercher des liens entre les problèmes moraux et les apports de la science à la connaissance du monde environnant.
On peut considérer comme le don de Roerich la façon dont ces «rapports» lui semblaient si naturels et se présentaient à lui dans toutes les manifestations de la vie. Et ce fut son étonnante capacité de synthèse, qualité quil admirait chez les autres et encourageait chez les jeunes, laquelle lui permettait de relier subjectif et objectif, philosophique et scientifique, sagesse orientale et connaissances occidentales, de jeter des ponts entre ces approches apparemment contradictoires. Penser à Roerich nous rappelle que de telles contradictions trouvent leur origine bien souvent dans lignorance humaine et que lélargissement de la conscience--but à poursuivre par chaque individu--mènera chacun finalement à reconnaître le caractère illusoire, ou relatif, des choses. Comme lécrit Garabed Paelian dans son livre Nicholas Roerich, Roerich «apprit des choses dont dautres ne tiennent pas compte; perçut des liens entre des phénomènes apparemment isolés et sentit inconsciemment la présence dun trésor inconnu». Serait-ce le «trésor inconnu» qui, dans les tableaux de Roerich, parle à la personne en harmonie avec cette signification sousjacente et qui explique la transcendance que daucuns ressentent devant ses toiles?
En 1902, les Roerich célébrèrent la naissance de leur premier fils, Georges, et au cours des étés 1903 et 1904, ils sillonnèrent la Russie, visitant une quarantaine de villes. Roerich avait comme but de comparer les styles et le contexte historique de larchitecture russe. Il fit de merveilleuses découvertes. Partout où ils passèrent, il réussit à trouver des vestiges du passé de son pays: monuments anciens, églises, remparts, châteaux. Ces vestiges étaient, dans bien des cas, négligés depuis des siècles. En tant quarchéologue et historien de lart, il savait pertinemment dans quelle mesure ils tenaient le secret de lhistoire culturelle de la Russie, et il résolut dattirer lattention de ses compatriotes à la situation. Dans le but den organiser la protection et la conservation, il peignit une série de soixante-quinze tableaux de ces structures historiques. Ce que Roerich éprouva pendant ce voyage linfluença de façon durable, car, dès son retour à Saint-Pétersbourg en 1904, il promulgua un projet visant à protéger de tels trésors culturels dans tous les pays, projet qui devait trouver sa forme définitive trente et un ans plus tard dans le Pacte Roerich. Cette manière de penser, peu courante à lépoque, anticipait limportance que la plupart des pays du monde accordent aujourdhui à la conservation de leur héritage culturel.
En 1904, Roerich peignit les premiers de ses tableaux à thème religieux. Parmi ces tableaux, illustrant pour la plupart des vies de saints et des légendes russes, citons La Nouvelle à Tyron, La Fournaise ardente et Le Dernier Ange, sujets quil reprit avec de nombreuses variantes au cours des années. Voici comment un écrivain décrit Le Trésor des anges: «Dinfinies rangées danges, vêtus de blanc, montent une garde silencieuse sur un mystérieux trésor auquel sont liés tous les destins du monde. Le trésor est une pierre bleu noir, gravée dun crucifix et brillant de lueurs émeraude». Ces anges offrent une première représentation des Maîtres hiérarchiques qui étaient au coeur de la croyance de Roerich en une Grande Fraternité qui veille sur lhumanité et la guide éternellement le long du sentier de lévolution. La «pierre» peinte par Roerich représente une image qui se répète sous différentes formes dans ses toiles et à travers ses écrits. On retrouve le mot «trésor» dans le titre de beaucoup des tableaux de Roerich, dans Le Trésor de la montagne ou Trésor enseveli, par exemple. Il ne sagit manifestement pas dun trésor matériel; lartiste se réfère aux trésors spirituels, qui, ensevelis, restent cependant accessibles aux chercheurs possédant la volonté de les découvrir.
Pendant ce temps, Roerich continua à chercher des trésors archéologiques. Lâge de pierre lintéressait tout particulièrement et il assembla une importante collection dobjets datant de cette ère. Souvent ses toiles reflètent cette passion: ainsi Trois Glaives, dont le thème, de nature archéologique, est relié à une légende ancienne. Roerich fait remarquer dans ses écrits létrange ressemblance des techniques et méthodes dornementation de lâge de pierre dont on retrouve des exemples dans des régions très éloignées les unes des autres. Lanalyse de ces correspondances lamena à tirer des conclusions instructives au sujet des caractéristiques communes à toute expression et toute créativité humaines.
L E T H É Â T R E
En 1906, Sergueï Diaghilev organisa à Paris une exposition dart russe, où figurèrent seize tableaux de Roerich. Il inaugurait là la magnifique série de promotions destinées à faire connaître aux Européens lart et la musique russes. Lannée suivante, Diaghilev présenta au public parisien la basse Féodor Chaliapine, avec la musique de Moussorgski, Rimski-Korsakov, Borodine, Rachmaninov, Scriabine, Glazounov et Stravinski. En 1909, il présenta de nouveau Chaliapine dans Ivan le Terrible de Rimski-Korsakov, pour lequel Roerich avait créé les décors et les costumes, ainsi que dans un acte du Prince Igor de Borodine. Pour cet opéra, Roerich dessina les décors et costumes des Danses polovtsiennes, présentées par le groupe de danseurs russes--Pavlova, Fokine, Nijinski--si célèbre par la suite sous le nom des Ballets Russes. Ces créations rehaussèrent la réputation de Roerich pour léloquence de sa représentation de cultures et pratiques anciennes.
Diaghilev inaugura une nouvelle forme dart qui impliquait la participation du décorateur comme «auteur». Ainsi Alexandre Benois influença la création du ballet Petrouchka et Roerich eut lidée originale pour le ballet Le Sacre du printemps, quil créa avec Igor Stravinski.
La genèse du ballet, intitulé au départ Le Grand Sacrifice: un tableau de la Russie paienne, se trouva dans la passion de Roerich pour lantiquité, et, comme il lécrivit dans une lettre à Diaghilev, dans «la belle cosmogonie de la terre et du ciel». Dans le ballet, Roerich chercha à exprimer les rites primitifs de lantiquité: les hommes saluent le printemps, source de vie, et sacrifient une vierge au dieu-soleil, Yarilo. Aucun ballet navait raconté une telle histoire. Tout aussi insolites, la musique de Stravinski et la chorégraphie de Nijinski: elles provoquèrent une contreverse qui dura plusieurs années.
Décrivant la première à Paris, le 29 mai 1913, un des spectateurs écrivit: « Rien de ce qui a été écrit au sujet de la bataille du Sacre du printemps ne réussit à donner la plus petite idée de ce qui eut lieu en réalité. On aurait dit que le théâtre sébranlait, secoué par un tremblement de terre. Les spectateurs crièrent des injures, hurlèrent, sifflèrent: la cacophonie noya lorchestre. On se gifla, échangea même des coups de poing,... le ballet fut dune beauté étonnante.»
Plus tard, Roerich interpréta ce qui aurait pu être jugé une réaction négative, barbare: «Je me rappelle comment les spectateurs à la première sifflèrent, hurlèrent si fort que lon nentendait rien. Qui sait, peut-être à ce moment-là exultaient-ils, pris par la même émotion que les peuples primitifs. Mais disons que ce primitivisme sauvage navait rien à voir avec le primitivisme raffiné de nos ancêtres pour qui le rythme, le symbole sacré et la subtilité du mouvement étaient des concepts grands et sacrés.»
Le Sacre du printemps représente le point culminant de la collaboration de Roerich avec Diaghilev. Roerich reconnut en Diaghilev un vrai champion de lart russe, et à sa mort en 1929 il écrivit: «On peut considérer les... accomplissements de Diaghilev ceux dun grand individu, mais il serait encore plus exact de voir en lui le véritable représentant dun mouvement entier vers la synthèse, un représentant éternellement jeune du grand moment où lart moderne brisa tant de conventions et de superficialités.»
L A P P R O C H E D E L A G U E R R E
Au cours des années qui ont précédé la Première Guerre mondiale, Roerich sentit venir un cataclysme, et dans ses tableaux il communiqua par des symboles la terrible ampleur du conflit qui menaçait le monde. Ces uvres annoncent la naissance de Roerich le «prophète».
Dans Bataille céleste, Roerich employa le violent contraste lumière-obscurité pour suggérer les terribles événements imminents en Russie et à travers lEurope entière. Dans sa façon de présenter des thèmes soit historiques soit naturels, lemploi de symboles et de lallégorie était à cette époque devenu un trait essentiel de son uvre. Comme lécrivit un critique: «Il peupla son monde, non pas dacteurs dans un drame ou comédie éphémère, mais de porte-parole des idées les plus constantes au sujet de la vérité de la vie, de la lutte millénaire du bien et du mal, et du progrès triomphal vers un avenir radieux pour tous.»
Assis sur un banc : Nicholas Roerich, Svetoslav Roerich (à côté de lui), George Roerich (assis à l'avant).
1914. Talashkino, province de Smolensk
V O Y A G E S À L É T R A N G E R
En 1915, Roerich fut atteint dune pneumonie, et son médecin lenvoya avec sa famille se rétablir à Sortavala en Finlande. Cette époque de grands troubles pour le monde entier fut tout aussi agitée pour la famille Roerich. Dans les tableaux de Roerich de cette période, Karelia--lAttente éternelle ou La Femme qui attend, par exemple, le paysage froid et austère, composé de rochers et des rives inhabitées du nord, semble exprimer un sens de poignante nostalgie. La Femme qui attend fixe lhorizon comme si elle attendait un signe, si minime soit-il, du retour de voyageurs partis depuis de longues années.
En 1917, la Révolution dévastait déjà la Russie et retourner vivre à Saint-Pétersbourg aurait été très dangereux. La famille commença à planifier un voyage vers lInde, laquelle exerçait sur eux une attraction de plus en plus forte depuis plusieurs années. La possibilité dun tel voyage devint réelle en 1918, lorsquun entrepreneur suédois invita Roerich à exposer ses oeuvres à Stockholm. De Suède, la famille alla à Londres, où sir Thomas Beecham avait invité Roerich à créer les décors et costumes pour une nouvelle production du Prince Igor à lOpéra de Covent Garden.
L A M É R I Q U E
Entre-temps, Roerich accepta une invitation du Art Institute de Chicago et, en 1920, inaugura une série dexpositions à la galerie Kingore de New York. En plus dexposer plus de 400 tableaux à New York et dans bien dautres grandes villes à travers les États-Unis, Roerich créa les décors et les costumes pour Snegourotchka et pour Tristan et Isolde à lOpéra de Chicago. Pendant ses voyages aux États-Unis, Roerich peignit une série de toiles au Nouveau-Mexique et la série intitulée Océan sur lîle Mohegan (Maine), où la famille passa un été. Très sensible à lesprit dentreprise quil trouva aux États-Unis, il salua à plusieurs reprises linfluence positive quexercerait sur le monde la technologie en évolution de ce vaste pays. Dautre part, le magnétisme de Roerich et son sens de sa mission influencèrent la vie de bien des individus.
En 1921, il fonda à New York le Master Institute of United Arts, institut où il pensait réaliser les idées pédagogiques déjà incorporées dans le programme de son école à Saint-Pétersbourg. Il attira un groupe dinstructeurs talentueux. Parmi eux, Deems Taylor, qui enseignait la théorie musicale et la composition, Robert Edmund Jones et Lee Simonson, professeurs de dessin de scène, et dautres professeurs de qualité qui enseignaient tous les instruments de musique, différents aspects de la peinture et du dessin, la sculpture, larchitecture, le ballet, lart dramatique, le journalisme et les langues. On invita des conférenciers de renom, tels que George Bellows, Claude Bragdon, Norman Bel Geddes et Stark Young.
À ses débuts, le Master Institute prospéra, mais il ne survécut que quelques années. En 1935, pendant que les terribles suites de la Crise de 1929 se faisaient sentir à travers le pays et que les Roerich voyageaient en Extrême-Orient, les fonds vinrent à manquer et certains événements causèrent leffondrement total de lorganisation que Roerich et ses associés sétaient évertués à créer.
Linstitution renaquit en 1949 seulement, sous la direction de Sina Fosdick, membre fondateur et ancien professeur du Master Institute, quand le Musée Nicolas Roerich ouvrit ses portes. Le Musée occupe toujours une maison de la 107e rue ouest, où les visiteurs peuvent voir, non seulement beaucoup de tableaux de la collection originale, mais aussi dimportantes oeuvres de Roerich acquises depuis 1949. Ainsi le Musée Nicolas Roerich présente aujourdhui une des collections les plus compréhensives du monde des tableaux de cet artiste.
Pendant leur séjour aux États-Unis, les Roerich continuèrent à organiser le voyage en Inde. On remarque dailleurs que, dans les oeuvres créées à cette époque, Roerich se tourne vers les valeurs spirituelles de lOrient. Ainsi, dans la série Océan, les trois tableaux Lui-même vint, Le Pont de gloire, et Le Miracle témoignent de la puissance spirituelle qui commençait à caractériser son oeuvre. Dans Le Pont de gloire, saint Serge de Radonège contemple un pont dun bleu profond: cest larc formé par laurore boréale, métaphore pour le pont spirituel qui à lavenir reliera terre et ciel.
Entre 1916 et 1919, Roerich avait composé un recueil de soixante-quatre poèmes qui parut à Berlin sous le titre Fleurs de Morya, et dont une traduction anglaise, Flame in Chalice, fut publiée par la suite. Dans ces poèmes, Roerich décrit son voyage intérieur et affirme son engagement dans la recherche spirituelle. Les poèmes évoquent des images reprises plus tard par Roerich dans ses toiles et, dune certaine façon, ils nous aident à comprendre les symboles des tableaux et la signification qui les sous-tend.
Dans son étude Flowers of Morya: the Theme of Spiritual Pilgrimage in the Poetry of Nicholas Roerich, Irina Corten écrit: «Au coeur des croyances de Roerich réside le concept hindou dun univers sans début ni fin, dun univers qui se manifeste dans la création et dissolution de formes matérielles en un cycle constamment renouvelé, créé par la pulsation de lénergie divine. Sur le plan humain, cela signifie lessor et la chute de civilisations, et, sur le plan individuel, la réincarnation dune âme...» Rappelons les vers de Roerich dans son poème À propos de lÉternel:
Frère, abandonnons tout ce qui change rapidement.
Autrement nous naurons pas le temps de réfléchir à ce qui reste inchangé pour tous.
À léternel.
En mai 1923, les Roerich partirent enfin pour lInde, pour le pays inchangé, où, vivant parmi les neiges de lHimalaya, ils allaient diriger leurs pensées vers lÉternel.
L I N D E
Les Roerich arrivèrent à Bombay en décembre 1923 et entreprirent de visiter les centres dintérêt culturel et historique, tout en faisant la rencontre de scientifiques, érudits, artistes et écrivains indiens. À la fin du mois de décembre, ils se trouvaient déjà au Sikkim, sur le flanc sud de lHimalaya. Le fait quils soient si vite arrivés dans les montagnes montre clairement que cest à lHimalaya surtout quils sintéressaient.
Ils entreprirent alors un voyage dexploration qui devait les mener jusquau Turkestan chinois, dans lAltaï, en Mongolie et au Tibet. Il sagissait dune expédition dans des régions inexplorées où ils avaient lintention détudier les religions, langues, coutumes et cultures des habitants.
Roerich décrivit cette première expédition en Asie centrale dans son livre Au Cur de lAsie, et y recréa, de façon vivante, les merveilles de la région et de ses habitants. Les images du livre, cependant, restent moins vives que celles des quelque cinq cents toiles que Roerich peignit pendant lexpédition. En regardant les tableaux Kangchenjunga, Sentier du Sikkim, Son Pays, Le Grand Esprit de lHimalaya, ainsi que la série Bannières de lOrient, nous voyons, dans la splendeur de lInde septentrionale qui en fournit le cadre physique, comment des images visuelles naissent à partir de concepts et idées philosophiques.
Dans La Voie, le Christ avance le long dun sentier tortueux à travers les précipices et les pics de lHimalaya, lesquels représentent les obstacles et les difficultés quaffronte le voyageur spirituel. Apparaissent dans les tableaux des personnages et des concepts importants dans les religions orientales. Parmi eux, signalons avant tout les représentations du Seigneur Maitreya--le Messie bouddhiste, lAvatar-Kalki des Purâna, Rigden Djiepo de Mongolie, ou le Bourkhan-Blanc de lAltaï. Ils figurent tous dans des légendes qui les associent au Seigneur de Shambhala, celui dont «le destin est dapparaître sur terre pour la destruction finale des méchants, la rénovation de la création et la restauration de la pureté», selon Le Glossaire théosophique de H. P. Blavatsky.
Le voyage fut parfois ardu. Roerich raconte quils traversèrent trente-cinq cols de quatre mille à six mille cinq cents mètres daltitude. Mais il se sentit né pour affronter de tels défis, croyant que les rigueurs des montagnes aident à trouver le courage et à développer la force spirituelle. De plus, malgré les obstacles, la croyance des Roerich à la bonté essentielle de la vie et à la spiritualité de lhumanité se trouva constamment renforcée. Dans les dix-neuf tableaux qui composent la série Bannières de lOrient, Roerich peignit les maîtres des grandes religions, Mahomet, Jésus, Moïse, Confucius, Bouddha, et les saints ou sages indiens et chrétiens, témoignant ainsi de lunité de leffort spirituel et des racines communes à la foi de chacun.
En contrepoint de ces thèmes de loeuvre de Roerich se trouvent limage de la Femme et le rôle que celle-ci doit jouer pendant lère à venir, et nous pouvons penser que les mots écrits par Éléna Roerich, dans une lettre de 1937, expriment également le point de vue de son mari: «La femme doit prendre conscience quelle porte en elle-même toutes les puissances et quà partir du moment où elle secouera lhypnose millénaire qui la force à une apparente soumission légale et la convainc de son infériorité mentale et où elle saccordera elle-même une vaste formation, elle créera en collaboration avec lhomme un monde nouveau et meilleur... Le cosmos affirme la grandeur du principe créateur de la femme. La femme est la personnification de la nature et cest la nature qui instruit lhomme, et non pas lhomme la nature. Par conséquent, puissent toutes les femmes saisir la noblesse de leur origine et puissent-elles sefforcer dacquérir la connaissance.» (Lettres dÉléna Roerich 1935-1939, vol.II)
Nicolas Roerich représenta les grandes déités féminines dans des tableaux tels que Celle qui conduit, Madonna Laboris, et La Mère du monde. Cette dernière conception, qui correspond aux divinités Laksmi et Kali en Inde, est une des images les plus inspirantes de Roerich, majestueuse, radieuse par lintensité des tons de bleu et de violet. La contribution quapporta Éléna Roerich à la vie et à loeuvre de Nicolas ne saurait être surestimée. On peut décrire leur union comme étant la collaboration toute une vie durant dans des domaines dintérêt et deffort communs. La philosophie dÉléna, comprenant une éthique de vie, fut partagée par Nicolas et le motiva dans son but de mener à bien son uvre et sa vie. Bien plus tard, à lapproche dun anniversaire dans leur vie commune, Nicolas écrivit dans son journal: «Quarante années, cest bien long. Durant un si long voyage, faisant face à bien des tempêtes et à des dangers extérieurs, ensemble nous avons vaincu tous les obstacles. Et les obstacles sont devenus des possibilités. Mes livres portent la dédicace suivante: À Éléna, mon épouse, mon amie, ma compagne de voyage, mon inspiratrice! Chacun de ces rôles a été éprouvé dans le feu de la vie. Et à Pétersbourg, en Scandinavie, en Angleterre, aux États-Unis et dans toute lAsie, nous avons travaillé, étudié, élargi nos consciences. Ensemble nous avons créé, et ce nest pas sans raison que lon dit que cette oeuvre devrait être attribuée à deux auteurs: un auteur masculin et un auteur féminin.»
En 1928, après la grande expédition, la famille Roerich sinstalla dans la vallée de Kullu, aux pieds de lHimalaya, à une altitude de deux mille mètres. De leur maison, on jouissait dune magnifique vue de la vallée et des montagnes environnantes. Ils établirent là le siège principal de lInstitut de recherches himalayennes Urusvati, fondé pour létude et lanalyse des résultats de leur expédition et des explorations à venir. Parmi les activités de lInstitut, on peut citer des études botaniques et ethnolinguistiques, ainsi que lexploration de sites archéologiques. Sous la direction de leur père, les deux fils Roerich, Georges et Svetoslav, recueillirent des plantes médicinales et firent des recherches approfondies en botanique, étudiant aussi les traditions médicales anciennes et la pharmacopée tibétaine et chinoise.
Lannée suivante, au cours dun séjour à New York où il sétait rendu pour linauguration du nouvel édifice du Musée Roerich, Roerich aborda un sujet qui lui tenait à coeur depuis de longues années. Prenant comme exemple la Croix-Rouge, il proposa un traité pour la protection de trésors culturels en temps de guerre et de paix; cétait une proposition quil avait déjà tenté davancer en 1914, mais en vain. Après avoir consulté des avocats experts en droit international, il rédigea un pacte et proposa que tous les endroits protégés selon les termes du pacte soient identifiés par un drapeau distinctif, la Bannière de la paix. Sur la Bannière on voit trois sphères magenta contenues dans un cercle de la même couleur, le tout se découpant sur un fond blanc. Parmi les nombreuses interprétations nationales et individuelles de ce symbole, les plus courantes sont peut-être celle de la religion, de lart et de la science réunis dans le cercle de la culture; ou encore celle des accomplissements passés, présents et futurs de lhumanité, entourés du cercle de léternité. Ce symbole se retrouve sur le sceau de Tamerlan, sur des bijoux tibétains, caucasiens et scandinaves, et sur des objets byzantins et romains. Il orne limage de la Madone de Strasbourg. On le voit dans beaucoup de tableaux de Roerich, en particulier dans La Madone à loriflamme, où il montre la Femme comme porte-drapeau et défenseur de la Bannière. Ce signe et la devise Pax cultura, qui laccompagne, symbolisent la vision pour lhumanité qui animait Roerich. Comme il écrivit: «Unissons-nous. Vous demanderez, de quelle façon? Vous serez daccord avec moi: de la façon la plus simple, par la création dune langue commune sincère. Peut-être dans la Beauté et la Connaissance.» Ses efforts en faveur du Pacte aboutirent, enfin, le 15 avril 1935, lorsque le traité du Pacte Roerich fut signé à la Maison Blanche à Washington, par les nations des Amériques, membres de lUnion panaméricaine. Il sagit dun traité qui reste toujours en vigueur. Bien des individus, groupes et associations de par le monde continuent dailleurs à attirer lattention internationale sur le Pacte, la Bannière, et les principes quils représentent.
Cest dans les tableaux montrant lHimalaya que lon retrouve les preuves les plus claires de la noblesse desprit, qui, avec son sentiment dune mission à accomplir, amena Roerich à entreprendre les tâches quil simposait. Dans ces toiles, en effet, on est saisi par le sentiment dun drame qui se déroule, par lurgence dun message à envoyer ou à recevoir, dun voyageur à accueillir, dune mission à accomplir, dun chemin à parcourir. Les montagnes imposantes représentent les buts spirituels que lhumanité doit se fixer. Roerich exhorta les hommes à poursuivre leur destin spirituel et leur rappela leur devoir de préparer la Nouvelle Ère, où Rigden Djiepo rassemblera ses guerriers et, sous la Bannière de la Lumière, vaincra larmée des ténèbres. Le guerrier Roerich était déjà armé, déjà monté; il chercha à rassembler son armée pour la bataille et il ordonna que les cuirasses portent le mot «culture».
Poursuivre le raffinement et la beauté était sacré aux yeux de Roerich. Il croyait que, même si temples et autres objets terrestres périssent, la pensée qui les crée, qui leur donne vie, ne meurt pas mais fait partie de léternelle vie mouvante et insaisissable de la conscience--les aspirations de lhomme, nourries de sa volonté et de lénergie de la pensée. Il croyait enfin que la survie de la planète et lavance du processus de lévolution dépendaient de la venue de la paix sur Terre, paix que les peuples devaient aider à faire naître, en sunissant, grâce à la langue commune de la Beauté et de la Connaissance.
Nicolas Roerich mourut à Kullu, le 13 décembre 1947. Son corps fut incinéré et ses cendres furent enterrées face aux montagnes quil aimait, et quil avait peintes si souvent dans ses sept mille uvres.